Albert Laprade
Architecte, jardinier, urbaniste, dessinateur, serviteur du patrimoine
L’œuvre d’Albert Laprade (1883-1978), bien que considérable, est surtout connue du public par la publication de ses carnets de croquis et par le majestueux palais de la Porte Dorée, ancien musée des Colonies construit pour l’Exposition coloniale de 1931 à Paris. Ce livre retrace son parcours atypique, qui le conduit à travailler d’abord comme collaborateur d’Henri Prost dans un Maroc dominé par la figure de Lyautey, puis pour la clientèle fortunée et souvent extravagante du premier quart du xxe siècle en France, avant d’acquérir une vraie notoriété en tant que créateur de jardins modernes à l’Exposition des arts décoratifs de Paris en 1925. Viendront ensuite les grands projets industriels et monumentaux de la maturité : usines, barrages, centrales électriques, siège de journal, ambassade, pavillons d’exposition…
Son attention au génie du lieu, son souci de rationalité, sa pensée socialement orientée, une stricte éducation classique (il est un compagnon d’étude de Jean Giraudoux au lycée de Châteauroux), dispensent Laprade de recourir à la provocation esthétique pour s’imposer. Chez lui pas de grands gestes, mais des architectures qui parlent, qui sous-tendent tantôt une culture, une civilisation, à l’exemple de ses réalisations marocaines – la nouvelle ville indigène de Casablanca (1916), la résidence générale de Rabat (1918) –, tantôt un usage, à l’instar du garage Citroën de la rue Marbeuf (1929), traité comme un théâtre d’automobiles ouvert sur la rue, ou encore une volonté d’intégration à la nature, et c’est alors le puissant barrage de Génissiat (1939).
Après la Seconde Guerre mondiale, Laprade prend acte du changement qualitatif qui s’opère dans le monde de la construction ; il illustre et défend à travers des milliers de dessins le patrimoine non monumental, celui des rues et des espaces publics, celui qui confère du caractère à un village, à une ville. Il laisse de nombreux écrits en faveur de l’éthique professionnelle, du rapprochement des architectes et des ingénieurs, de la prise en compte des aspirations du public… Ce récit thématique, qui fait découvrir les épisodes d’une vie de travail foisonnante et éclectique, croise, pour le plaisir du connaisseur comme du simple curieux, l’histoire de l’architecture, de l’urbanisme et des jardins au XXe siècle.
Les auteurs
Maurice Culot, architecte et critique visionnaire, fait vivre depuis quarante ans son amour des années 1920 et 1930 dans des constructions et des livres qui visent à une renaissance architecturale et urbaine inspirée des meilleures réalisations de la première moitié du XXe siècle. Afin de partager son engouement et d’encourager les recherches et les vocations sur ce qu’il considère comme un âge d’or, il a constitué d’importantes collections documentaires et a réalisé de nombreuses expositions et publications dans le cadre des Archives d’architecture moderne et de la Fondation pour l’architecture à Bruxelles, et au sein de l’Institut français d’architecture à Paris. Il poursuit ses activités entre Bruxelles et Paris, notamment à partir de son agence parisienne Styles Architects.
Anne Lambrichs, architecte et docteur en histoire de l’art, partage son temps entre la recherche et l’enseignement. Auteur de József Vágó, un architecte hongrois dans la tourmente européenne, monographie parue aux éditions des Archives d’architecture moderne à Bruxelles en 2003, elle a collaboré à de nombreuses publications avec Maurice Culot, notamment L'Architecture Art déco, Bruxelles 1920-1930 (1996) et Megève 1925-1950, architectures de Henry Jacques Le Même (1999), tous deux publiés aux éditions Norma.
Dominique Delaunay, chargé de mission à la Cité de l’architecture et du patrimoine/Institut français d’architecture à Paris, a signé, ces vingt dernières années, les photographies contemporaines de nombreuses publications et expositions sur l’histoire des villes et des territoires et sur des architectes du XXe siècle, notamment Dom Bellot, moine architecte (1996), Henri Sauvage (2002), Charleroi, Mons, Valenciennes, villes de la frontière (2003), aux Éditions Norma, et Alger, paysages urbains et architectures (Les Éditions de l’Imprimeur, 2003). Il est l’auteur d’une enquête historique et photographique publiée dans Albert Gabriel, architecte, archéologue, artiste, voyageur (éditions Yapi Kredi, Istanbul 2006).