Discours d'ouverture de la partie française
Catherine Chevillot, présidente de la Cité de l'architecture et du patrimoine
Madame Catherine Chevillot, conservateur du Patrimoine, docteur en histoire de l’Art et Présidente de la Cité de l’architecture et du patrimoine, se déclare honorée d’ouvrir ce premier séminaire sur les anciennes routes postales de la province du Guangdong.
La Cité de l’architecture et du patrimoine est un établissement public du ministère de la Culture, lieu historiquement lié au patrimoine, puisque le Musée des Monuments français, prémisse du plus grand musée d’architecture d’Europe, et l’École de Chaillot, ont été fondés à la fin du XIX° siècle par des personnalités aux sources de la doctrine de la restauration des Monuments historiques en France.
Patrimoine et création contemporaine sont les piliers de la Cité de l’architecture et du patrimoine, car ils sont non seulement liés à des enjeux essentiels, mais aussi par des enjeux d’interaction. Pour réhabiliter un bâtiment, il faut en effet articuler une création contemporaine à un patrimoine ancien.
La Cité de l’architecture et du patrimoine est un lieu ayant vocation à rassembler, à former, et à échanger. L’enjeu de cette conférence est d’autant plus fort que la culture, dans certains endroits du monde, est menacée par des phénomènes naturels, par l’accélération de la mondialisation de l’économie, ou par des événements liés à des guerres. Il existe donc un danger d’appauvrissement des territoires, de rupture entre la culture urbaine et la culture rurale, entre les métropoles et les petits villages. Face à ces problématiques communes, il est possible d’apprendre les uns des autres.
C’est grâce à un poète originaire de la province du Guangdong, (Huang Zunxian 黄遵宪 1848-1905) que le terme 文明 « civilisation » s’est propagé au début du XXe siècle, associant joliment le caractère de la culture (文) et celui de la lumière (明). Ce magnifique symbole illustre bien le fait que la culture éclaire la civilisation. La lumière de la culture peut guider dans le processus de restauration, qui n’est pas seulement un problème technique, mais un problème culturel. L’enjeu est de rechercher dans ces ressources culturelles des guides pour faire face aux déséquilibres sociaux, écologiques et économiques. Les différents objectifs sont de sauver le patrimoine, de le transmettre, et de le faire vivre.
Les échanges culturels entre la Chine et la France sont anciens, en particulier ceux qui nous lient à l’université Tongji. Cette ancienneté est une richesse, qui repose fondamentalement sur la confiance dans les personnes. Le sinologue François Jullien a dit que « l’altérité se construit », et je dirais volontiers que l’altérité nous construit également. Ce programme a été préparé par des rencontres entre décideurs, chercheurs, gestionnaires. Il est fondamental de comprendre globalement l’environnement et les expériences mutuelles, en pratiquant l’interdisciplinarité.
Madame Chevillot souhaite que cet échange soit fructueux et remercie tous ceux qui y ont contribué.
Roger Bataille, Vice président des Petites Cités de Caractère de France
Monsieur Roger Bataille, au nom de Françoise Gatel présidente de l’association et de toutes les Petites Cités de Caractère de France, qu’il a l’honneur de représenter, fait part de tout l’intérêt porté à la participation à ce séminaire, et remercie chaleureusement les organisateurs pour leur invitation.
La convention signée entre les Petites Cités de Caractère, la Cité de l’architecture, l’université Tongji et le WHITRAP Shanghai, outre la formalisation d’échanges, a affirmé la volonté commune d’engager un véritable partenariat qui n’a cessé de s’enrichir. La problématique relative aux héritages patrimoniaux rassemble la Chine et la France. Abordée depuis plusieurs décennies en France, la question patrimoniale est toujours vivante pour apporter des réponses en harmonie avec l’évolution de nos sociétés, apporter de nouveaux usages pour de nouvelles fonctions, et s’adapter aux technologies les plus modernes.
Pourquoi restaurer et protéger son patrimoine ? Comment le patrimoine peut être un moteur essentiel de la revitalisation économique, du développement touristique et de l’identité culturelle d’un territoire ? Peut-on associer pleinement patrimoine et innovation dans un même projet ? L’appropriation de la notion patrimoniale par les habitants de la cité n’est-elle pas la clé de la réussite du projet patrimonial ? La liste n’est pas exhaustive, et se nourrit des questionnements de nos sociétés contemporaines.
Face à l’évolution très rapide des technologies et à leur impact sur les modes de vie, et face aux préoccupations environnementales, la notion patrimoniale est l’héritage de l’histoire et de la culture. Elle peut et doit être le lien entre les générations. Cette notion rassemble pour partager les expériences, les bonnes pratiques et pour faire face à de nouveaux défis.
Monsieur Bataille souhaite vivement que les échanges lors de ce séminaire contribuent à renforcer le partenariat.
Fabien Sénéchal, président de l'association nationale des architectes des bâtiments de France
Monsieur Fabien Sénéchal remercie tous les représentants des collectivités, les universitaires, les architectes, ainsi que les organisateurs de ce webinaire. Tous, même en travaillant sur des échelles différentes, partage une matière qui est commune et universelle.
L’Association nationale des architectes de bâtiments de France est une association à caractère particulier puisque la grande majorité des adhérents de l’association sont tous des fonctionnaires du ministère de la Culture, affectés au territoire.
L’association a pour vocation de créer du lien en participant à des groupes de travail, et colloques à l’échelle nationale et internationale, d’explorer de nouvelles pistes et de réfléchir à des questions de préservation et de mise en valeur du patrimoine. À ce titre, la Chine représente un partenaire privilégié de l’association, avec qui de nombreux échanges ont eu lieu pour l’élaboration de ces journées d’études.
Le rôle majeur des architectes des bâtiments de France (ABF) est de travailler en relation étroite avec les acteurs des politiques d’aménagement du territoire : collectivités locales, associations, professionnels de l’urbanisme et du bâtiment, autres services publics en charge des politiques urbaines et de protection de l’environnement. Ils sont les héritiers, depuis la Révolution française, d’une longue histoire de la protection des monuments et des sites. Cette protection a débuté au XIX° siècle par la protection des monuments les plus emblématiques. Puis les grandes guerres mondiales qui ont frappé l’Europe ont amené l’élargissement de ces questions de protection, initialement centrées sur des bâtiments, voire des parties de bâtiments.
La protection a été étendue aux édifices entiers, voire à des ensemble d’édifices, puis aux quartiers, aux villes, et à la fin du XX° siècle, et sous l’impulsion de l’Unesco, aux territoires. En France, les problématiques de protection territoriale à grande échelle, par exemple, les forteresses Vauban ou les routes des vignobles du bordelais ou de l’est de la France, posent aujourd’hui deux questions. D’une part, comment organiser cette protection qui doit aller du macro, de la plus grande échelle, au micro, c’est-à-dire à l’objet. D’autre part, comment mettre en réseau un grand nombre d’acteurs tout en conservant l’opérationnalité nécessaire à la vie des territoires. Les échanges présents sont donc essentiels et nécessaires pour progresser sur ces deux thématiques.