Léa Casteigt (née en 1986) est diplômée de l’École d’architecture et de paysage de Bordeaux (EnsapBx) en 2010. Avec l’architecte italien Alessandro Baiguera (né en 1983), diplômé de l’université d’architecture de Venise (IUAV), elle crée l’Atelier Boteko en 2013, basé à Paris et à Aillas (33). La rénovation d’une ferme à Aillas a remporté le prix Maisons d’architectures à vivre, dans la catégorie « environnement et confort » en 2018.
Le portrait
Leur atelier parisien, un ancien local commercial rénové, est un condensé du travail archéologique et sensible que réservent Léa Casteigt et Alessandro Baiguera à leurs projets. Chaque lieu, même le plus banal, est porteur selon eux de singularités et de potentialités à explorer, de solutions spécifiques et fécondes. Le patrimoine n’est pas un territoire du passé, mais bien un enjeu de création contemporaine à l’aune de la prise de conscience écologique, soutiennent-ils. Prenant une certaine distance avec la figure de l’architecte-bâtisseur, l’Atelier Boteko a donc choisi d’ausculter l’âme des bâtiments. Immersive, la méthode commence par un relevé détaillé à la main afin de répertorier chaque élément, de comprendre sa raison d’être et de forger les arguments qui pourront légitimer sa réutilisation, sa transformation ou son détournement. Ils ont créé leur agence avec l’intuition que ce travail à même le terrain leur permettrait de se mesurer à la construction, comme l’artisan, d’éprouver son impact physique. La métaphore de l’architecte portugais Eduardo Souto de Moura, qui compare l’édifice à une bête sauvage qu’il s’agit d’apprivoiser en douceur, résonne particulièrement dans leur manière de procéder. Leur laboratoire s’applique aujourd’hui à des projets modestes, par leurs échelles, leurs budgets, mais tous portent l’ambition de faire surgir une idée d’architecture et d’améliorer les espaces du quotidien, en connivence avec les usagers.
C’est justement pour aller à la rencontre de ce type de commande, pour s’imprégner des lieux et de leurs habitants, qu’ils ont fait le choix d’une double implantation, à Paris et à Aillas, commune rurale d’où Léa Casteigt est originaire. Cette proximité avec le territoire amplifie leur compréhension des contextes géographiques et culturels, et en particulier des techniques de construction locales. Chaque projet est l’occasion de préserver et enrichir les spécificités d’un bâtiment, d’en stimuler le ressenti et l’appropriation. L’équilibre est subtil, car leur propos n’est en aucun cas de verser dans une posture conservatrice ou une idéologie identitaire.
Réactiver ce patrimoine, c’est aussi décider de ce qui a de la valeur ou n’en a pas. Dans ce sur-mesure, le rôle de l’architecte peut alors consister à ôter de la matière plutôt qu’en rajouter, pour révéler les traces profondes des interventions humaines, valoriser une structure, la profondeur d’un mur. Ils assument l’esthétique inachevée de l’ouvrage produite par la superposition visible des matériaux révélés et de ceux du projet. L’esprit de leur travail se résume dans le nom de leur atelier, Boteko, un terme portugais évoquant un lieu dépouillé à l’atmosphère tranquille. Il scelle leur rencontre dans ce pays lors de leur année Erasmus, une expérience fondatrice. C’est là-bas qu’ils ont saisi la manière dont les projets contemporains savent puiser dans l’architecture traditionnelle locale, et non des formes et langages préconçus et étrangers. C’est là-bas aussi qu’ils ont pratiqué le dessin à main levée, rapide et foisonnant, qu’ils poursuivent dans leur pratique et la vie courante, pour apprendre à regarder autrement cette matière première essentielle, l’existant, et le ranimer.
La citation
« Le premier dessin est celui du relevé à la main. Nous considérons l’existant comme une matière première essentielle sur laquelle nous prenons appui. »

Ferme transformée en habitation, Aillas (33), 2016 (livraison), Atelier Boteko, Léa Casteigt associée à Alessandro Baiguera.
Le projet : Maison de vacances familiale
Comment doser les interventions dans une ferme traditionnelle pour ne pas verser dans les excès qu’appelle parfois ce type de rénovation ? Interroger la notion de confort, au rythme des saisons, est un moyen de ne pas céder aux sirènes d’une isolation totale, qui masquerait la belle charpente de la grange et transformerait son grand portail en une ouverture décontextualisée. La ferme conserve sa structure traditionnelle, lieu de vie et cuisine, espace de travail et de stockage au centre, étable. L’intégrité du volume de la grange est préservée. Non chauffé, celui-ci se prête pourtant à une multiplicité d’usages : grandes tablées l’été dans la fraîcheur du site, stockage et bricolage l’hiver… Cette attention portée à l’architecture du lieu, à sa logique constructive et à son langage, amène à cibler les travaux. Comme une couche supplémentaire sur les traces sédimentées, ils se superposent à l’architecture d’origine : chaînages en béton, rebouchages à la chaux, charpente en peuplier réalisée sur le modèle de l’ancienne, avec le voligeage laissé brut.
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Contact
Atelier Boteko
134, rue des Couronnes 75020 Paris
11, avenue Pierre Brossolette 33110 Le Bouscat
09 81 96 22 19info@atelierboteko.com
www.atelierboteko.com@atelierboteko
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Fiche technique
Lieu : Aillas (33)
Programme : Transformation d’une ferme agricole en habitation
Maîtrise d’ouvrage : Privée
Maîtrise d’œuvre : Atelier Boteko ; ETBA (BET structure)
Budget : 350 000 € HT
Surface : 400 m2
Calendrier : 2013-2014 (études), 2016 (livraison)