Le portrait
Entrer chez Mima, c’est un peu comme être accueilli dans l’intimité d’une famille. Sébastien Magrez et Antoine Michaud sont inséparables. Le t-shirt en témoigne : leur relation est fusionnelle, mais pas exclusive. Impossible de savoir qui des deux a posé les premiers traits d’un projet. Impossible aussi de distinguer ce qui y relève de contingences techniques, des exigences du maître d’ouvrage, des contraintes du budget, etc. L’unicité des réalisations de Mima, leur cohérence tient à la manière dont les architectes partagent la conception, stimulent des discussions bienveillantes avec les acteurs d’un projet pour aboutir à un propos commun. Expérimenter l’amabilité de l’acte de construire est une façon pour eux de « transcender l’environnement avec politesse ». De la même manière que l’équipe professionnelle formée aujourd’hui par Sébastien et Antoine prolonge leur colocation étudiante, leurs premiers projets sont souvent des histoires d’amitié. Tout juste diplômés, ils montent un festival de bric et de broc dans le quartier du Petit-Maroc à Saint-Nazaire. Avec leur bande, ils campent sur place, improvisent des installations, des concerts avec les habitants. La poésie des lieux impose la méthode : faire pour faire, avec convivialité, comme un bœuf musical où on se laisse surprendre par les rythmes du voisin. Après le Petit-Maroc, le collectif d’artistes Komsumat les invite à intervenir à Pforzheim, en Allemagne. Sans budget, ils construisent un banc et une scène avec le bois qu’un forestier veut bien leur céder. La rencontre est fructueuse, ce dernier les choisit pour réaliser une autre installation au Das Fest, à Karlsruhe. Ainsi fonctionne Mima, au rebondissement. Ses architectes revendiquent le droit à s’étonner soi-même, à ce que leurs réalisations se passent de mots, conservent une poésie implicite. L’architecture est avant tout un événement partagé, une joyeuse kermesse, un processus sans heurt. Et puisque c’est le dialogue qui légitime un projet, il faut accepter une part de hasard dans ce qui en émerge. Sébastien et Antoine évoquent leurs réalisations avec pudeur. Leur frugalité esthétique est pareille à leurs personnalités tout en retenue. On peut voir ce minimalisme comme une traduction littérale de leurs exigences constructives : Mima peaufine longuement ses détails de menuiserie pour qu’ils incarnent toute la domesticité de ses logements, elle cale avec précision le dimensionnement de ses structures pour profiter au maximum de leurs capacités. L’agence est adepte du « juste nécessaire », du « moins pour le plus ». Est-il paradoxal d’apprivoiser la part de doute intrinsèque à la conception tout en assurant une maîtrise du moindre geste, des croquis jusqu’aux photographies et en se formant au Building Information Modeling (BIM) ? Appartenir à la famille Mima, c’est admettre qu’il n’y a pas toujours de logique à l’architecture.
Sébastien Magrez (1985) et Antoine Michaud (1985) sont diplômés de l’École nationale supérieure d’architecture de Nantes en 2009 et 2011. Ils fondent l’agence Mima en 2013 à Nantes.
La citation
« Travailler proche du lieu, de ses usagers, est une façon de projeter sans heurt, avec politesse. »
Le projet : Brasserie artisanale
Comment installer un bâtiment industriel dans un tissu pavillonnaire ? La brasserie du Bouffay, implantée dans un hameau à quelques kilomètres de Carquefou, occupe une parcelle-patchwork qui détonne dans le quartier. Pour optimiser les lieux et créer de nouveaux espaces de stockage, un premier bâtiment est construit au fond du terrain, un second sur rue. Les dimensions de ce dernier sont importantes : 6 m de hauteur de façade et 9 mètres au faîte, le gabarit est celui d’une grande maison. La toiture est asymétrique pour troubler la perception de l’épaisseur du bâtiment et la rapprocher de celle des habitations voisines. Le bardage métallique noir mat ajoute une ambiguïté qui facilite l’intégration du bâtiment : d’une présence massive en plein jour, il se fait plus discret à la nuit tombée, seulement souligné par ses panneaux de polycarbonate translucide dorés. Noir et or : la matérialité est calquée sur la charte graphique de l’entreprise. Plutôt que de proposer un bâtiment générique flanqué de publicités, c’est la construction même qui identifie la brasserie.
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Contact
Atelier Mima
5 Passage Douard
44000 Nantes
02 85 52 33 16
contact@ateliermima.com
www.ateliermima.com
@ateliermima_architectes -
Fiche technique
Lieu : Carquefou (44)
Programme : rénovation et extension d’une brasserie artisanale
Client : SARL Brasserie du Bouffay
Équipe : Atelier Mima
Budget : 323 000 € HT
Surface : 460 m²
Livraison : janvier 2015