L’histoire du tourisme est aussi l’histoire des transports et des mobilités. D’ailleurs, durant de nombreuses années, les acteurs économiques du tourisme étaient rattachés au ministère des Transports.
Le phénomène aujourd’hui appelé « itinérance », c’est-à-dire de vacances en mouvement, est relativement récent. Le modèle qui subsistera longtemps en France est celui des déplacements sur les lieux de vacances, mer ou montagne. Une fois ce déplacement fait, le touriste est sédentaire.
Quelques routes touristiques naîtront en France dans les années 50. La première est la route des vins d’Alsace. L’échelle est celle de la Province / la Région, une route prévue pour être parcourue en voiture, avec l’objectif de relier des villes et villages traversant le vignoble. Cette célèbre route existe toujours. Elle traverse des villages de caractère et est le prétexte d’une valorisation du patrimoine, mais aussi la vente de vins produits tout au long de l’itinéraire.
Les routes qui apparaitront ensuite dans les années 80 et 90 se construiront autour d’une thématique, comme par exemple le vin ou le fromage, ou des motifs plus culturels, comme la route Napoléon. Ces routes sont une succession d’étapes construites pour les automobilistes.
Un changement d’approche se produit à la fin des années 80 avec le développement de la randonnée comme pratique de loisirs. On redécouvre alors les anciens chemins, et tout le territoire sera aménagé, avec notamment les GR (pour Grande Randonnée) destinés à la grande randonnée pédestre. À la fin des années 80, le Conseil de l’Europe créé des itinéraires culturels européens, avec des grandes routes traversant toute l’Europe, anciennes voies romaines ou routes de pèlerinage. Les routes du pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle, créées en 1987, sont les premières de ces voies. Ce réseau est inscrit en 1998 sur la Liste du patrimoine mondial de l’UNESCO.
À la fin des années 90, le développement des infrastructures d’hébergement et de nouveaux services permettront aux personnes de pratiquer la randonnée dans le cadre de leurs vacances. De plus en plus d’organisateurs de voyage proposeront ce type de séjour : c’est l’essor du slow tourism.
La fin des années 2000 voit le développement de la randonnée à vélo, avec l’aménagement de grands réseaux de pistes cyclables. Par exemple, un parcours à vélo d’une centaine de kilomètres a été aménagé le long de la Loire. Ce parcours est devenu un produit touristique international, avec des hébergements adaptés ou des services de mécaniciens et de loueurs.
Ce marché touristique est actuellement en pleine croissance, car les personnes souhaitent de plus en plus aller à la découverte de villes et de villages avec des modes de déplacement lents, bateau, vélo, randonnée pédestre ou équestre, roulotte ou calèche. Ces touristes ont une relation au temps différente, et partent à la recherche de rencontres authentiques, c’est-à-dire qu’ils cherchent à partager les modes de vie et les cultures des territoires qu’ils traversent.
Les conséquences pour les cités historiques sont importantes. Il s’agit de s’inscrire dans ces parcours, afin de valoriser la commune, son histoire, son patrimoine. Il faut également intégrer ces nouvelles formes touristiques dans l’urbanisme. En effet, les visiteurs viennent s’ils sont assurés de trouver des services et des aménagements adaptés à l’accueil de leur mode de transport (vélo, cheval, camping-cars, bateau…). De nombreux labels ont été créés pour informer de nouveaux aménagements et de nouveaux services, comme « l’accueil vélo ».
Au-delà de l’accueil de ces nouveaux visiteurs, c’est le produit culturel et touristique qu’il nous faut aussi repenser, car ces touristes souhaitent souvent prendre le temps de découvrir toutes les formes de patrimoine (matériel, immatériel, culturel, naturel), et la façon dont les gens vivent dans les territoires qu’ils traversent : manger comme les habitants, participer à une manifestation culturelle et festive, acheter des produits locaux, … Il nous faut donc proposer à ces visiteurs avant tout des temps de rencontre et de partages de la culture des territoires.
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l'auteur
Laurent Mazurier
Directeur des Petites Cités de caractère de France -
à propos
Article issu d'une présentation dans le cadre du webinaire "Patrimoine, mise en valeur et revitalisation des territoires"