De tout temps, et aux quatre coins de la terre, les hommes ont habité sur l’eau. Villages flottantes, et embarcations diverses ont été investis pour l’habitat ou le commerce afin de profiter de richesses naturelles, faire face aux catastrophes climatiques, fuir un envahisseur ou s’isoler.
Architecture Vernaculaires
Village lacustre de Los Uros, Pérou
Dans la partie péruvienne du lac Titikaka la superposition de roseaux totora, abondants sur les rives fournissent le gîte et le couvert. Ils sont consommés et utilisés comme matériau de construction. Habitations, mobilier, bateaux et même le sol des villages flottants au milieu du lac sont en totora : un mètre cinquante de roseaux, renouvelés par le dessus au fur et à mesure du pourrissement des couches inférieures. Les Uros ont disparu depuis une cinquantaine d’années au fil des mariages avec les indiens Aymaras du continent. Ceux-ci vivent de pêche et de plus en plus du tourisme, perpétuant ainsi les traditions ou du moins ce qui en est le plus représentatif.
Voir aussi Los Uros de William Man, 15 min.
Les Maadans, « Arabes des marais », Irak
C'est ici, dans ce « pays entre deux fleuves », que la Bible situe le jardin d'Eden. Composé de trois marais principaux, ce territoire mouvant s'étire ou se réduit au gré de l'humeur du Tigre et de l'Euphrate. Ce labyrinthe de roseaux a accueilli tous ceux qui fuyaient l'oppression depuis l'époque babylonienne et jusqu'à la guerre entre l'Iran et l'Irak (1980-1988). Suite
Chinampas : agriculture flottante mésoaméricaine, Mexique
Une chinampa est une surface cultivable créée dans les zones lacustres de Mésoamérique comme Texcoco et Xochimilco. Cette technique d'agriculture utilisée par les Nahuas et en particulier par les Aztèques, permettait de subvenir à plus de la moitié des besoins en nourriture de Tenochtitlán, la grande capitale de l'époque. Les chinampas se présentent sous la forme d'un réseau de canaux et d'îles artificielles, généralement rectangulaires, dépassant d'environ un mètre de la surface de l'eau.
Autre exemple d'agriculture flottante
Les sampaniers de la rivière des parfums, Hué, Viêtnam
Des sampaniers vivent dans leurs maisons flottantes (les sampans) depuis plus de deux cent cinquante ans, sur la rivière des Parfums (Huong river) qui coule au centre d’Hué, ancienne capitale impériale de 1802 à 1945. Les Sampaniers ont lié leur vie à celle du fleuve qui leur donne refuge et subsistance. En effet, leur occupation principale est la pêche et le commerce qui s’y rattache. Toute la vie des Sampaniers tourne autour de leur embarcation, où il est commun de trouver les parents, les grands parents et les enfants (en général, 6 personnes). Tous participent au dragage et à la pêche !
Les Bajau, nomades de la mer, Indonésie, Malaisie, Philippines
Ils sont nommés « les Gitans de la mer » puisqu'ils ne restent jamais bien longtemps à leurs ports d'attache.
Le fond des pirogues en bois est doté d’une trappe qu’ils ouvrent pour coller leur oreille à la surface de l’eau. Ils écoutent les bruits émis par les poissons. La pirogue est bien plus qu’une simple embarcation. Elle est un lieu de vie qu’il faut protéger et une marque d’identité. Ils ont également de petites maisons sur pilotis juste à côté des sites de pêche pour se protéger dès que la tempête arrive.
Village lacustre de Ganvié, Bénin
Situés sur la rive nord-ouest du lac Nokoué au sud de la République populaire du Bénin, les maisons toffinu (ou fon) regroupent plus de 15 000 personnes dans le village lacustre de Ganvié. “Aucun pont ne le relie au rivage, et même dans Ganvié, les espaces entre les maisons sont recouverts d’eau, et les habitants dépendent des pirogues, qui sont leur seul moyen de transport ainsi que leur instrument de travail. […] Les habitations lacustres toffinu sont construites sur des plateformes posées sur des pilotis qui s’élèvent de 1 à 2 m au-dessus de l’eau pendant la saison sèche, lorsque le niveau de l’eau est au plus bas. À la saison des pluies, des pirogues peuvent être guidées jusqu’au-devant de la porte de chaque habitat. Les pilotis qui soutiennent la plate-forme et se prolongent dans la structure des murs de la maison sont des pieux enfoncés à 2 m de profondeur environ dans la vase au fond du lac1.” Les matériaux de construction sont tous locaux et proviennent des villages avoisinants (feuilles de palmiers, bambous, lianes, paille…). Les toits en paille très épaisse protègent efficacement de la pluie et isolent de la chaleur.La typologie de la maison toffu la plus répandue offre trois espaces distincts : la plateforme sur pilotis (interface entre l’espace collectif et l’espace privé/maison), l’espace séjour-cuisine/réserve d’eau, un espace de repos/chambre.
Village Autonome, Vancouver, Canada
Wayne Adams et Catherine King
Sur la côte de Vancouve Wayne Adams (66 ans) et Catherine King (59 ans) ont commencé par construire une maison en 1991. Alors qu'une tempête leur fait miraculeusement don d'arbres par dizaines, les Robinsons décident de développer et d'étendre cet espace, de manière à le rendre complètement autonome. Fait de 12 plateformes flottantes, notamment un dancefloor, une galerie d'art, un phare, un studio, le village est aussi autonome. 5 serres et 1 hectare et demi pour les productions agricoles, l’été le couple utilise l'eau de la cascade, et l'hiver, l'eau de pluie. Les 14 panneaux solaires et un système de générateur leur permettent d'avoir en moyenne 12h de lumière quotidienne. Ils se nourrissent essentiellement de leur pêche, des fruits et légumes qu'ils cultivent, et n'ont ni frigo, ni congélateur.
Projets utopiques et projets historiques
« Louise-Catherine », une péniche asile rénovée par le Corbusier
Rénovation Le Corbusier (1929)
La Seine, Paris, France, 1915, rénovation 1929
La Louise-Catherine est une péniche française construite en 1915, en ciment armé. C'était à l'origine un chaland appelé Liège, destiné à ravitailler Paris en charbon depuis Rouen1 par la Seine. Elle est surtout connue pour avoir été utilisée, après son réaménagement par Le Corbusier en 1929, comme asile flottant pour les sans-abri de 1929 à 1994 sous la gestion de l'Armée du salut. Elle resta longtemps sans usage puis en rénovation au port d’Austerlitz à Paris 13e. Elle coula le 10 février 2018, en 20 minutes, à la suite d'une avarie survenue après l’importante crue de la Seine ayant eu lieu les jours.
Thalassa
Paul Maymont (1926-2007)
Projet Tokyo, Japon, 1959 ; projet Monaco, France, 1963
Architecte français aux idées particulièrement innovantes et prospectives, Paul Maymont imagine en 1959 la "ville flottante" pour la baie de Tokyo. Une solution qui permettrait la création d'une ville de dix millions d'habitants sous forme d'îles flottantes de trois à cinq cents mètres de diamètre reliées entre elles par des ponts suspendus, des routes et des voies ferrées. En France, Paul Maymont adapte son travail pour l'extension de Monaco en 1963. Ce nouveau projet intitulé "Thalassa" a la forme d'une coquille circulaire. Les logements et les espaces de vie sont organisés en terrasses autour du fond vide qui devient un étang d'eau avec un port, des plages, des piscines et des jardins. L'île serait soutenue par des ponts flottants en béton précontraint.
Kasumigaura, ville flottante
Kisho Kurokawa (1934 - 2007)
Projet Ville flottante, Kasumigaura, Japon, 1961
Résumé : En 1961, Kisho Kurokawa conçoit Floating city (la ville flottante) comme un projet d’habitat basé sur un lac au nord de Tokyo, à Kasumigaura. Il dessine une rue surélevée qui surplombe la gigantesque mégastructure. Les voitures circulent sur le sommet des pentagones, des escalators en spirales relient le toit au port. Chaque habitant a la liberté de construire la maison de son choix. Il en détermine lui-même la forme, l’orientation, le style et peut changer chaque fois qu’il le désire. L’ensemble de l’urbanisme et de l’architecture de la ville est structuré par le réseau de circulation/transport. Kisho Kurokawa matérialise ici la métaphore biologique spirale/structure ADN qui a pour fonction de transporter l’information. Élevée sur ses hélices d’ADN, la ville flottante tridimensionnelle s’intègre dans la mouvance de l’urbanisme spatial défini par Yona Friedman dans son livre L’Architecture mobile. “Les images surréelles du bonheur métaboliste (un vacancier, consommateur du loisir de masse, pêche la crevette sous les pales d’un hélicoptère, qui crée un vent artificiel propice aux joies du yachting entre des falaises d’ADN en béton) ne sont pas si éloignées des stations qui s’édifieront sur la côte Languedoc-Roussillon.”
Triton City
Richard Buckminster Fuller (1895-1983)
Tokyo Bay, Tokyo, Japon, 1968
Richard Buckminster Fuller a conçu Triton City comme une cité évolutive (par agrégation de modules). Chaque quartier pouvait accueillir de 3 500 à 6 500 habitants. Deux typologies de bâtiments coexistent : des modules linéaires pouvant accueillir 1 000 habitants avec des modules pyramidaux pour 6 500 habitants. Les agrégations des différents quartiers pouvaient constituer une cité de 15 000 à 30 000 habitants, avec des écoles et les différents services construits à une distance piétonne des appartements. Au niveau technologique, Triton City s’inspire fortement de la construction des platesformes pétrolières. Les modules de Triton City pourraient être construits dans des chantiers navals à sec.
Maison flottante
Guy Rottier (1922-2013)
Date et Lieu : Projet 1983
Résumé : « Un ami architecte, spécialiste de la plongée et de la pêche en mer, rêvait d’avoir une maison semi-immergée qui ne serait visible que sous l’eau. Elle n’est restée malheureusement qu’au stade de l’idée, un dessin à son image que l’on pourrait éventuellement encadrer et suspendre au mur. »
Guy Rottier, Belvédère, mai 2007.
L’iceberg, logements pour S.D.F
Guy Rottier (1922-2013)
la Seine, Paris, 2007
« Le manque de logements, la hausse des loyers et le chômage ont eu pour résultat un accroissement constant du nombre des “Sans Domicile Fixe”. Je propose de les placer, temporairement, bien en vue, dans un tissu urbain de grande qualité : le pont des Arts, par exemple, qui relie le quartier du Louvre à celui de Saint-Germain-des-Prés. L’idée consisterait alors à construire sur la Seine, un immeuble flottant en forme d’iceberg qui lui serait directement relié. Il comporterait de petites cellules individuelles simples mais fonctionnelles pour les loger et des ateliers de bricolage. L’iceberg est une structure symbolique qui parle autant à ses destinataires qu’aux passants. Aux premiers, il rappellerait les rigueurs de leur condition antérieure tout en leur insufflant la volonté et le désir de se construire un nouvel avenir. Par son caractère insolite, il interpellerait les seconds en leur signifiant que le vrai problème des SDF est la partie invisible de l’iceberg. Il concerne toute la société, non seulement le temps d’un article dans la presse, mais vingt-quatre heures sur vingt-quatre, et tous les jours de l’année. »
Abri Main
Guy Rottier (1922-2013)
Projet 1979-1983
Trouvant leur origine dans l’observation de la nature, dans l’analyse d’architectures traditionnelles, proches aussi de l’esprit de récupération des Nouveaux Réalistes (Arman, Ben et Yves Klein), les maisons de Guy Rottier sont en totale opposition formelle et conceptuelle avec le conformisme qui régnait dans les années 1970. Adoptant la forme d’une main posée au sol, cet abri gonflable, conçu pour une courte période de vacances, présente l’avantage d’une mise en place rapide et d’un démontage ne laissant ensuite aucune trace sur le terrain. Suite sur le site du FRAC Centre
Aixilia, projet d’extension d’Aix-les-Bains sur le lac du Bourget
Jean-Louis Chanéac
1963-1968
Ce projet d’extension d’Aix-les-Bains sur le lac du Bourget est particulièrement marqué par la recherche de Chanéac sur les systèmes évolutifs et modulables à partir de cellules industrialisées et mobiles. L’extension comprend plusieurs types de structures, amarrées dans le fond de l’eau. Habiter sur un lac devient ici synonyme de loisir, de jeu et de plaisir. Suite sur le site du FRAC Centre
Floating Cities
Charles Simonds
projet 1978
Résumé : Avec ce projet de « Villes flottantes », Simonds imagine un nouveau mode d’organisation urbaine, fondé sur la mobilité, l’échange et le désir des habitants. Refusant le principe généralisé d’une ville « spécialisée », qui assimile un lieu à une fonction, l’artiste propose de transférer les terrains sur des barges flottantes, selon différentes typologies (habitations, bâtiments publics et administratifs, industries, espaces verts…). Suite sur le site du FRAC Centre
La Venise monégasque
Yona Friedman
1960/2006
En 1966-1967, avec l'architecte niçois Guy ROTTIER, membre du GIAP (Groupe International d'Architecture Prospective, dont Yona FRIEDMAN justement fut l'un des fondateurs en 1965), Yona FRIEDMAN se penche – déjà – sur le territoire de la Plaine du Var. Une véritable ville y est pensée pour 200 000 à 500 000 habitants, pourvoyant à ses besoins en alimentation grâce au maintien d'une agriculture locale, qui doit pourtant cohabiter avec des infrastructures majeures de transport, avec un immeuble linéaire de quinze étages serpentant le long du fleuve sur une longueur développée de plus de trente kilomètres et avec des tours hélicoïdales de quatre-vingt-cinq étages. Portant la marque plus personnelle de Guy ROTTIER, cet aspect du projet se prolonge par la contribution de Yona FRIEDMAN sous la forme de deux quartiers (Venise et Ariel) construits en bord de mer (voire au-dessus de celle-ci), en lieu et place de l'aéroport, qui complètent les lieux de travail et d'habitation répartis dans la plaine par une cité de vacances pour 200 000 à 300 000 résidents. Comme l'ensemble du projet, cette proposition est pensée dans un esprit participatif ouvert aux usagers. Venise toujours avec "La Venise monégasque", qui est le nom d'un projet antérieur de Yona FRIEDMAN pour un aménagement pensé en superstructure au-dessus du port de Monaco. Formulée en 1959, cette proposition répond à une pénurie d'espace en Principauté que l'on anticipait face à une croissance annoncée de la population.
Village sous-marin
Jacques Rougerie (1945-)
Projet 1973.
Suite au projet lacustre d’aquaculteurs aux îles Célèbes en Indonésie, dans le cadre d’une étude pour l’Unesco1, Jacques Rougerie s’investit dans les recherches en cours à l’université d’Hawaï sur les villages sous-marins. Comment reconvertir des pêcheurs en futurs agriculteurs de la mer ? Comment créer une aquaculture subaquatique avec des communautés de 250 à 300 personnes qui pourraient s’installer de trois à six mois sans remonter, à une profondeur de trente mètres sous l’eau ? “Le projet de ferme sous-marine s’articule autour d’une base conçue pour ses futurs paysans de la mer et la recherche physico-chimique et biologique du milieu sous-marin. Il est prévu que cette structure soit complétée d’un centre d’entraînement pour astronautes. Habiter la mer, est-ce vraiment possible ? et dans quelles conditions ?
Galathée, base sous-marine
Jacques Rougerie (1945-)
Date et Lieu : Zone Océanique, 1976-1977.
Résumé : La base sous-marine Galathée, habitat/laboratoire semi mobile à l’usage des missions de recherches scientifiques et techniques s’inscrit dans la droite ligne du programme du CAME 1971/1976 (Centre d’architecture de la mer et de l’espace) qui faisait suite aux programmes dirigés par le commandant Cousteau portant sur des expériences de plongées en saturation : immersion de longue durée, maisons sous la mer. “Avec Galathée, j’ai souhaité essayer de faire une maison basée sur la bionique, qui s’apparente à rien de préexistant et qui s’adapte au mieux au milieu sous-marin, avec une possibilité d’autonomie de vie en immersion de trois mois pour quatre à cinq personnes. J’ai cherché volontairement à avoir le moins d’impact possible sur le monde sous-marin. C’est un choix délibéré. La base sous-marine de 7 m de long de forme oblongue, coque en acier, offrait à ses plongeurs une vue exceptionnelle. Par les immenses hublots de 2,20 m de diamètre, le monde sous-marin venait à nous.
Voir aussi le SeaOrbiter
Oceanix, projet de village flottant du futur des Nations Unies
Bjarke Ingels Group (BIG)
Projet, révélé le 4 avril 2019 lors de la première table ronde sur les villes flottantes et durables aux Nations Unies, New York.
Afin de répondre au problème de la montée des eaux et du risque inhérent pour les villes côtières, un concept de ville hexagonale sur mer a été dévoilé récemment ! Le Bjarke Ingels Group (BIG) a dévoilé les premières images de leur concept de ville flottante, conçue pour résister aux désastres naturels comme les tsunamis et les ouragans. La ville pourra accueillir à peu près 10 000 résidents et sera capable de produire sa propre énergie, de l’eau fraîche et de la chaleur. Oceanix City a également été pensée pour grandir, se transformer, s’adapter au fur et à mesure du temps, évoluant ainsi indéfiniment ! Faisant partie intégrante du nouvel agenda urbain de l’United Habitat, la ville flottante et ses partenaires (BIG et le MIT Center For Ocean Engineering) proposent un écosystème créé par l’Homme, dans une perspective de développement durable. Le tout, en utilisant des matériaux durables et respectueux de la planète.
Informations pratiques
Cité de l'architecture & du patrimoine
1, place du trocadéro et du 11 novembre
75116 Paris
minimaousse@citedelarchitecture.fr
Calendrier
- 19 mars 2020 : Lancement du concours
- 9 octobre 2020 : Colloque à la Cité de l'architecture & du patrimoine
- 12 janvier 2021 - 16h : Date limite de remise des projets
- du 18 au 22 janvier : présélection
- mi-mars 2021 : jury final
- été 2021 : Atelier de fabrication de maquettes à grande échelle
Date de lancement : 19 mars 2020
Date de rendu final : 12 janvier 2021 - 16H